Christ en bois (Le)
Gaston Couté revisité par Louis Le Meur et Serge di Marchi
Les textes du poète Gaston Couté (1880-1911) sont écrits pour être lus. Lorsque les cinéastes amateurs Louis Le Meur et Serge di Marchi décident dimmortaliser le « Christ en bois » ils ne sy trompent pas. Louis Le Meur (1899-2002, voir Fil à Fil n°4), comédien de talent fait entendre ce texte avec le langage du paysan beauceron et du désespoir devant la misère humaine dans tout les sens du terme. Lacteur principal est un clochard (un homme de peu comme lont disait alors) qui ne trouvant ni gîte ni couvert dans une commune, échoue au pied dun calvaire avec un christ en bois pour seule compagnie. Pourtant il avait comme il le dit « tiré la sonnette dalarme » auprès du curé et de « ses dévotes celles qui berdouilllent (bredouillent) des pater nosters pour aller dans ton Paradis ». Lhomme se couche et rêve à un monde meilleur; un christ Saint Sulpicien apparaît qui lui offre du pain, du vin. Mais au réveil, lhomme se lève et dit à la statue, « mais toi que les curés ont planté et qui trône chez les gens de justice, tes rien quun mannequin au service des riches qui te mettent au coin de leurs biens pour faire peur aux moineaux du chemin, que je me soumet, et pour ça que la bise grande te foute à bas, Christ de contrebande, Christ de lÉglise, Christ de la loi, quas tout, de partout, quas tout en bois »
« Le Christ en bois » est une création réalisée entre amis et passionnés de théâtre et de cinéma. Serge di Marchi (1913-1983) ingénieur à EDF rencontre Louis Le Meur à Paris au Ciné-Club. Il collabore avec Jean-Yves Bagourd pour la prise dimages.
Le choix de la musique est du à Louis Le Meur, mélomane averti qui sait trouver lextrait musical qui renforce au mieux une émotion, une idée et le jeu des acteurs. Lutilisation du célèbre « Adagio » de Tomaso Albinoni (qui est en fait une uvre recomposée par le musicologue Remo Giazotto en 1945 à partir des restes dun fragment de sonate en trio retrouvé parmi les décombres de la bibliothèque de Dresde) est en symbiose avec laction et le rôle ; le mouvement lent convient parfaitement au déroulement laction. Lesprit indépendant et cabochard de Gaston Couté « Merle du peuple », son rêve dévasion sociale et son désir de sélever contre la misère humaine sont ici exprimés. Gaston Couté se définit lui-même comme un poète solognot utilisant un patois du terroir chartrain, mais lutilisation de ce langage na pas une connotation péjorative ; chez Couté, il exprime autant son attachement à son pays natal que son analyse minutieuse et cynique de la société.
Pascal Le Meur (11/04/2007)
Par : Cinémathèque de Bretagne