Maison dite Manoir de Boultous, Lagatjar (Camaret-
Le manoir de Saint-Pol-Roux n´est que ruines. On peut encore voir quatre tours d´angle, la base de quelques colonnes et des amorces d´escaliers. Mais les descriptions de certains visiteurs et des photos d´époque permettent d´en faire la description suivante : le manoir était composé de deux bâtiments, avec aux quatre angles de chaque quatre tourelles, reliés entre eux par un bâtiment central plus bas. Le manoir comportait un étage avec combles excepté au niveau de la partie centrale. Celle-ci était pourvue d´une large porte d´entrée, surmontée d´une fenêtre ronde, tel un vitrail, et entourée de deux colonnes, ainsi que d´une large porte-fenêtre côté mer, surmontée d´une corniche ouvragée. Ce bâtiment était en pierre et en béton recouvert de ciment. On y comptait une quinzaine de pièces. Chaque tourelle possédait des ouvertures et une porte donnant sur le jardin. Les encadrements étaient en briques rouges et la couverture en ardoise.Saint-Pol-Roux, de son vrai nom Paul Roux, était un brillant poète, surnommé « Le Magnifique ». Né en Provence en 1861, il publie son chef d´oeuvre « La Dame à la faulx » en 1899. Il s´installe en Bretagne sur les conseils d´une danseuse du boulevard de Clichy « Allez à Camaret, mon pays d´origine ! Un petit port perdu au bout du monde auprès de Brest, mais le plus joli qui existe : une merveille. Quand vous l´aurez vu, vous ne voudrez plus partir ».La famille est installée depuis 1898 à Roscanvel dans une chaumière de Lanvernazal. Mais Saint-Pol-Roux souhaite se rapprocher de la communauté artistique de Camaret. En 1903, il achète sur la crête de Pen-Hat une maison de pêcheurs ou de douaniers qui formera la partie centrale de sa maison. En 1904, la construction de sa maison de villégiature commence sur les conseils d´un ami architecte, M. Philippe. La famille s´installe en 1905 dans un "manoir" complètement baroque. Comme Marcel Sauvaige, Charles Cottet, André Antoine et Gustave Toudouze, ses voisins immédiats, St-Pol-Roux habite désormais sur la crête de Pen-Hat face à la mer. La demeure transformée est nommée le manoir de Boultous (baudroie en breton) et est rebaptisée manoir de Coëcilian après 1916, en mémoire de son fils tombé à Verdun.Le prestige du poète dans les cercles parisiens attire chaque été à Camaret une colonie d´artistes et d´intellectuels : André Breton, Max Jacob, Paul Sérusier, Victor Ségalen, Georges Ancey ou encore Jean Moulin alors sous-préfet de Châteaulin vers 1930. Saint-Pol-Roux, qui vit là toute l´année, participe également à la vie locale et est très apprécié de la communauté de pêcheurs : il offre des cadeaux à Noël, participe à la reconstruction de la chapelle Rocamadour, aide à l´achat d´un canot de sauvetage, accélère le classement des alignements de Lagatjar, rédige l´oraison funèbre de Rosalie Dorso, etc... En juin 1940, la Presqu´île est occupée par l´armée allemande. Des soldats blessent le poète et sa fille et tuent la bonne. En octobre 1940, à sa sortie de l´hôpital, et malgré des scellés, Saint-Pol-Roux retrouve son manoir pillé et occupé. Toutes ses oeuvres sont détruites et le poète s´éteindra quelques jours plus tard, sous le choc. En 1944, le manoir, toujours réquisitionné, est bombardé par les alliés. Complètement en ruines, il ne sera jamais restauré.
Auteur(s) du descriptif : Galifot Agnès
Par : L'inventaire du patrimoine